Michaël Quernez est vice-président PS du Conseil général du Finistère en charge de l'Insertion et de l'Economie. Un département sous le feu des projecteurs en raison des difficultés de l'abattoir de porcs Gad, filiale du groupe breton Cecab. Les salariés seront fixés sur leur sort ce vendredi 11 octobre. Le Finistère redoute un « drame humain » pour 850 personnes alors que plusieurs entreprises de l'agroalimentaire connaissent des difficultés et notamment une autre filiale de la Cecab, Boutet Nicolas, à Rosporden. Entre celle-ci et Gad, 1.000 emplois du groupe Cecab sont directement menacés à la pointe de la Bretagne.
850 personnes risquent de perdre leur emploi en Finistère. Quelles sont les pistes de reconversion pour ces personnes sur votre territoire ?
A l'heure où on se parle, le Tribunal de commerce n'a pas encore pris sa décision. La situation risque malheureusement d'être celle que vous exposez.... Car il n'a été déposé, il y a deux jours, que le plan de continuation de la Cecab et ce plan ne prévoit que le maintien du site de Josselin et la fermeture de celui de Lampaul-Guimiliau ainsi que du siège social de Saint-Martin-des Champs. En Finistère, on est sur le licenciement prévisionnel de 850 salariés.
Dans le cadre de ce plan de continuation, 300 reclassements doivent être proposés...
Oui mais il y a très peu de chance que ces propositions soient suivis d'effet. En effet, à chaque fois qu'un dossier de cette nature est proposé, on s'aperçoit que les propositions de reclassement ne trouvent pas preneurs pour des raisons évidentes de proximité géographique. Josselin, c'est à 250 kilomètres de Lampaul-Guimiliau. La plupart n'envisage pas de tout quitter du jour au lendemain pour aller y travailler. De plus, je crois que les salariés sont extrêmement touchés et nombreux à ne pas croire à l'avenir de Josselin. Cela pourrait donc se conclure par des licenciements secs. J'ose espérer que l'on pourra se mobiliser largement et prendre en compte les situations les plus urgentes. Il y a des possibilités, certes, de formations mais on le sait, ce n'est pas simple. Car, dans ces entreprises, la culture de la formation professionnelle n'est pas évidente. Et ces personnes n'auront pas la possibilité de trouver un autre travail, surtout dans la conjoncture actuelle.
En effet, le Finistère connaît d'autres difficultés. Il y a celles de Doux, de Marine Harvest. Mais il y aussi le spécialiste de la volaille Tilly-Sabco. Où en est le dossier ?
Le destin de Tilly Sabco nous inquiète grandement. Tilly Sabco est une entreprise née des cendres de la crise de la volaille et qui commençait à bien se porter. Le dirigeant pensais ne plus avoir besoin des restitutions aux exportations et patatras. On apprend la fin de celles-ci. Il a donc a engagé un repli industriel.
Et puis, il y a aussi le destin de Boutet-Nicolas à Rosporden une conserverie de légumes qui appartient au groupe Cecab et qui emploie plus de 200 salariés. C'est dramatique, car c'est une entreprise qui gagne de l'argent. Dans le Finistère, la Cecab, c'est 1.000 salariés dans la rue. Pour ne pas plonger totalement, le groupe est en train de vendre les bijoux de famille. C'est une très lourde responsabilité. D'autant que les primes de licenciement sont extrêmement faibles.
Comment expliquez-vous les difficultés actuelles d'une partie de la filière agroalimentaire en Bretagne ?
Il ne faut pas non plus oublier que certaines entreprises de l'agroalimentaire se portent très bien, innovent, créent, exportent, mais on assiste à des errements de stratégie industrielle. Les spécialistes s'accordent à dire que le montant de rachat de l'abattoir Gad par la Cecab n'était pas supportable à court terme. Aujourd'hui, il n'est pas étonnant que le groupe se retrouve dans une telle difficulté. Et puis, des investissements ont été réalisés à l'étranger en dépit du bon sens. Et aujourd'hui, on a un groupe obligé de se restructurer à marche forcée, avec de la casse sociale partout en France.
Ici en Finistère, nous avions mis en garde l'Etat contre la loi de modernisation de l'économie et la destructuration des relations contractuelles entre les industries de première transformation et la grande distribution. On avait dit que cela mettrait en grande difficultés les entreprises. On y est. La grande distribution ne joue pas le jeu. Les industriels sont dans l'impossibilité de répercuter un certain nombre de variations de marché et notamment le coût de l'aliment qui a explosé.
Propos recueillis par A.G.
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